
Le mensonge de Régis Immongault sur l’impact des cours du pétrole
Régis Immongault le ministre gabonais de l’économie a donc menti. Dans une déclaration publiée le 10 décembre 2014 par notre confrère « Gabonreview », le ministre, réagissant à la dégradation de la note du Gabon par l’agence de notation Fitch ratings intervenue en décembre 2014, confiait au confrère que « le Gabon est préparé à subir sans impact majeur le choc sur les prix du pétrole ». Le ministre poursuivait en affirmant que « …la croissance de l’économie restera forte l’année prochaine, nonobstant une baisse durable du prix du pétrole ». Pour montrer qu’il ne s’agissait pas de promesses en l’air pour se rassurer, le ministre brandissait comme preuve «… la dernière mission du Fonds monétaire international (FMI) à Libreville, qui a conforté la prévision de croissance du Gabon, fixant cette dernière à 5,7% avec un prix moyen du baril à 80 dollars…..Même à 65 dollars le baril, la croissance resterait forte, autour de 5%». Cette mission faut-il le rappeler était conduite par Anne Marie Guil-Wolf, une vieille connaissance du ministre à l’époque où sous Paul Toungui, il pilotait les négociations avec le FMI. Cette « amie » avait été appelée à la rescousse pour venir « valider » les choix économiques du Gabon. Au moment où des indices inquiétants montraient que ce pays n’était pas loin de la faillite. Il fallait coûte que coûte rendre service à un « ami » qui venait d’hériter du ministère de l’économie un mois plus tôt en période de bourrasque financière.
Cette belle construction a volé en éclat sous l’effet de la réalité. Le Gabon à la lecture des derniers évènements de conjoncture sur le secteur pétrolier, n’est pas prêt à y faire face. Et n’a jamais été prêt. Contrairement aux affirmations du ministre. Au point que l’agence de notation Standard & Pour’s a dû revoir à la baisse plus tôt que prévu, le 13 février 2015, ses perspectives pour l’économie gabonaise. Rejoignant ainsi les prédictions de l’agence Ficht ratings qui, en novembre 2014, annonçait « une faillite » du Gabon en 2015.
Pour Standard & Pour’s, «…. la baisse du prix du pétrole affecte matériellement les équilibres fiscaux internes et externes du Gabon, ainsi que les perspectives de croissance économique du pays, compte tenu de sa forte dépendance en pétrole. Nous prévoyons maintenant que la croissance du PIB réel devrait ralentir à 3,5% en 2015. Nous nous attendons à ce que les soldes budgétaires et extérieurs se détériorent et soient déficitaires en raison de l’environnement à la baisse du prix du pétrole. Par conséquent, nous réduisons notation du Gabon à «B+» au lieu de «BB-». Un contre pied parfait aux certitudes du ministre appuyées par cet « expert ami » du FMI.
Mieux l’agence annonce des lendemains qui déchantent après avoir observé la prééminence du pétrole dans l’économie gabonaise. 50% des revenus du gouvernement, environ 80% des exportations, et l’on estime 20% à 30% du PIB. Dans un tel contexte indique Standard & Pour’s, « …..L’environnement d’un prix du pétrole plus faible conduira à une croissance économique plus faible, et mettre la pression sur l’équilibre budgétaire, ce qui conduira à une détérioration marquée de la balance des paiements au cours des prochaines années.». Cela voudrait dire que du fait de l’inconscience de ce pouvoir, l’économie gabonaise va devoir dépenser plus d’argent à l’extérieur qu’il n’en reçoit. Ce schéma a conduit le Fmi dans les années 80 à initier les premiers plans d’ajustement structurel (PAS). Sans lesquels plusieurs pays auraient « fait défaut ». C’est la situation dans laquelle se sont retrouvés la Grèce, l’Espagne et le Portugal. Ces pays ont dû appliquer une thérapie de choc pour rééquilibrer leurs comptes extérieurs notamment leurs balances de paiement. Les mesures qui suivent sont les licenciements massifs, la hausse des impôts, l’arrêt des subventions et la baisse des salaires, comme c’est le cas au Gabon en cemoment. Autant dire un cadre explosif que ce pouvoir s’apprête à léguer aux autres.
Pourtant dans leur communication mielleuse, aidé en cela par des experts complaisants tel que Anne Marie Guil-Wolf du FMI, ou la Banque britannique Standard Chatered prompte à voir « des fondamentaux solides » partout dans l’économie du Gabon, le pouvoir avait affirmé avoir constitué des réserves dans un fonds pour les générations futures. Transformé par Ali Bongo Ondimba en fonds d’investissement stratégique. Un fonds souverain du Gabon. En réalité il n’en a rien été. Standard & Pour’s assure que «….Malgré des décennies de production de pétrole et plusieurs années d’excédents budgétaires, les réserves fiscales sont faibles… Nous notons que le gouvernement accuse des arriérés auprès des fournisseurs et n’a pas réussi à rembourser les paiements de TVA en temps opportun. Nous notons aussi des inconsistances dans les données concernant les excédents budgétaires et la situation d’endettement du gouvernement qui a continué d’augmenter en dépit des excédents constants au cours des dernières années.
Le fonds souverain de la République Gabonaise (FSRG) est officiellement censé recevoir 10% des revenus du pétrole prévus dans le budget, et 50% des revenus excédentaires à la loi de finances, ainsi que toutes les recettes provenant des activités d’investissement. Cependant, jusqu’en 2014, le fond ne contient que moins de 200 milliards de francs CFA (environ 2% du PIB). Le total des actifs financiers du pays actuellement ne sont égaux qu’à environ 10% du PIB, y compris les dépôts de l’État à la banque centrale régionale, la Banque des Etats de l’Afrique Centrale (BEAC), et dans les banques commerciales. Nous prévoyons que le gouvernement va financer ses déficits en puisant dans ces dépôts et en s’endettant sur les marchés obligataires régionaux et internationaux. Nous prévoyons que la dette générale nette du gouvernement augmentera pour atteindre 35% du PIB d’ici 2017, alors qu’elle était de 23% du PIB à la fin 2013 ».
Face à tel tableau sombre, on comprend mieux pourquoi le porte-parole du président de la République, intervenant le même vendredi 13, a plutôt fait diversion en s’en prenant à la presse. Au lieu d’indiquer aux gabonais ce que le pouvoir compte faire pour prémunir le Gabon de cette catastrophe annoncée.
Jean Michel Sylvain