« Nous n’avons pas de pays de rechange »

Désiré Éname
Désiré Éname
Désiré Éname
Désiré Éname

 

En cinq années de gouvernance de sa petite majesté Ali Bongo Ondimba, chaque Gabonais – ouvrier, enseignant, ménagère, cadre, chauffeur, militaire, policier, éboueur, chômeur – doit s’armer de courage et regarder froidement ces cinq années de gouvernance et mesurer l’état réel du pays.

En cinq ans, sa petite majesté n’a pas la capacité de dire ce qu’a donné sa politique de l’éducation ; celle de réduction de la pauvreté, sinon par des annonces tonitruantes. Il ne saurait rien dire sur sa politique de l’emploi dans un pays, le seul au monde, où la courbe de la croissance est ascendante et celle du chômage avec. Inouï. Qu’a donné la politique de la santé en cinq ans ? Les théoriciens de l’émergence ont la manie de présenter des bâtisses qui, pour eux, constituent la modernisation du système sanitaire comme une réussite. Mais comment comprendre que sa petite majesté et son entourage d’émergents continuent de chercher des solutions à leur santé dans des systèmes hospitaliers en Occident ? C’est simplement là, la preuve de la défaillance de l’offre de soins dans leur propre pays. Sans offre de soins valable, point de système sanitaire efficace. Conclusion : il a échoué sur ce volet. Qu’a donc réussi sa petite majesté ?

La coercition. La gabegie. La concussion. L’encrage du crime rituel. Le mensonge. La manipulation. Le fétichisme. Le syncrétisme maçonnique. La dévalorisation du tissu scolaire. Le délabrement du tissu social. Le projet de loi « Accrombessi » contre la xénophobie, etc. La liste est longue. Qui subit ? Les Gabonaises et les Gabonais. Le Gabonais souffre. Et il n’est plus question qu’il souffre plus longtemps.

De l’extérieur, les peuples africains qui se sont libérés du joug des oppresseurs ont une nouvelle maxime : « Maboule comme un Gabonais. » Une chose est certaine, le Gabonais est plutôt ce peuple qui accepte d’être poussé jusqu’aux limites de sa patience. Il réagit sans sonner d’olifant. Samedi, lorsque les milices de sa petite majesté ont bouclé l’école Martine Oulabou pour interdire la réunion des syndicats, ces derniers sont-ils retournés chez eux ? Non. Ils ont tenu mordicus sur leur rendez-vous et leur réunion a eu lieu dans un autre site. Cet acte est symbolique de la détermination des franges de ce peuple à ne plus se laisser marcher sur les pieds.

C’est en cela que l’opposition doit comprendre que lorsque le gorille vous effraie en brousse, la solution n’est pas de lui tourner les talons auquel cas il vous les arrache. Il faut plutôt se dresser face à lui et pousser le cri le plus fort. Et c’est lui qui prendra la poudre d’escampette. C’est ce que le peuple attend de l’opposition. Thomas Jefferson, disait : « Le peuple est le seul sur lequel nous puissions compter pour préserver notre liberté. » Il n’existe nulle part où les changements se soient opérés et qu’il y ait eu une mobilisation spontanée du peuple. Celui-ci a toujours été conduit. Organisé. Appelé. Cette démarche ne peut en rien signifier un appel à l’insurrection, comme tendent à le faire croire sa petite majesté et ses sbires. Dans un mémorable discours, le même Thomas Jefferson disait que« se révolter contre la tyrannie, c’est obéir à Dieu ». Or, c’est Dieu qui a créé le Gabon. Et non pas une petite majesté appelée Ali Bongo Ondimba. Lui, le tyrannise. Et comme il aime aussi à le dire, « nous n’avons pas un pays de rechange». Oui, les Gabonais le savent. Mais « ce petit-là» ne savait pas que c’était en guise d’avertissement qu’ils le lui disaient.

Les Gabonais doivent se défaire des anti-valeurs. « On va encore faire comment ? », cette fameuse ritournelle bâtarde dans laquelle se complaisent de nombreux compatriotes est une anti-valeur. C’est la chanson de la résignation. Comment, devant le péril de l’avenir de ses enfants, un père peut-il la répéter à souhait ? Lorsque les uns sont massacrés dans des crimes rituels, comment peut-il se résigner ? Et quand les autres sont guettés par un chômage endémique, à cause d’un régime discriminatoire, comment peut-il se résigner ? Lorsque les étudiants sont bafoués dans leur honneur et dans leur dignité, comment peut-il se résigner ? Lorsque ses droits constitutionnels, notamment le droit à la liberté d’expression, sont supprimés par le pouvoir, comment peut-il se résigner ? Lorsque la télévision publique, qui vit de ses impôts, se détourne des préoccupations réelles du pays, comment peut-il se résigner ? Au Gabon, tout père n’a qu’un choix aujourd’hui : celui de ne pas se rendre complice de sa petite majesté Ali Bongo Ondimba et de l’éminence grise de son pouvoir, Maixent Accrombessi.

Une autre anti-valeur est le message distillé par le pouvoir désigné pour faire croire que les opposants envoient les enfants des autres dans les émeutes, pendant que les leurs sont à l’abri en Europe. De la manipulation. Orchestrée de surcroît par un certain Attias. Question simple : lorsque Onanga Y’Obegue dit Akbar, Ernest Mpouho et d’autres thuriféraires faisaient transporter des gosses des quartiers de Libreville par wagon entier pour une marche à Franceville, leurs enfants étaient-ils aux premières loges ? Etaient-ce les enfants d’Opiangah ou de sa petite majesté qui sont allés saccager chez Ping, le lundi 12 janvier dernier ? Les enfants d’Onanga vivent en France pour la plupart. De quoi parlent-ils ? Peuple gabonais, tournez le dos à ces anti-valeurs. Tout homme doit se mobiliser à chaque instant pour son bien-être. C’est un droit constitutionnel. Et c’est un devoir. Que tout citoyen le réclame, depuis les pères et mères jusqu’aux fils et filles.

Le petit régime de sa petite majesté consiste en les effets d’annonce et la manipulation, le tout saupoudré d’effets de communication pour faire croire à l’extérieur à une réalité du Gabon qui n’est que factice. La réalité gabonaise est, aujourd’hui, celle d’un peuple désabusé, qui a décidé de dire « ASSEZ ». C’est ce que sa petite majesté veut empêcher par la militarisation et l’intimidation. Les seules armes qu’il connaisse. Et qui n’effraient plus personne.