
La traque contre Ndong Sima est lancée

Les services de sécurité ont reçu, pour consigne d’exhumer toutes les affaires dans lesquelles le nom de l’ancien Premier ministre apparaît afin de les réactiver. A Oyem, un jeune homme qui avait été cité dans une affaire que le pouvoir avait attribué, à tort, à l’ancien Premier ministre a été contacté et conduit à Libreville à cet effet. Pour l’heure, l’homme refuse toute compromission.
Raymond Ndong Sima sera le second, après Jean Ping, dans le collimateur du pouvoir. Très inquiets en raison de rumeurs annonçant une possible candidature à l’élection présidentielle de l’ancien Premier ministre, ou son ralliement au Front uni pour l’alternance, le pouvoir a d’ores et déjà réactivé l’arme judiciaire à l’encontre de ce dernier. La sortie de son prochain livre, que l’on dit pas du tout tendre pour la gouvernance d’Ali Bongo Ondimba, n’y est pas étrangère.
En effet, en fin de semaine dernière, un jeune homme s’est présenté à la rédaction. Il a indiqué être venu d’Oyem dans la voiture d’un agent des services de sécurité et a été interrogé pendant plus de 3 heures par un capitaine en charge des enquêtes. Le récit qu’il va faire de cet interrogatoire est détonnant. L’officier lui demandait tout simplement de poursuivre l’Etat Gabonais au motif qu’il avait été incarcéré pendant plusieurs mois, pour finir par être mis hors de cause pour preuves insuffisantes. Cette demande lui avait déjà été faite, en début de semaine dernière, par un officier du même corps à Oyem, dans le bureau d’un magistrat du tribunal local. Le jeune homme, qui veut passer à autre chose dans sa vie, a refusé tout net l’offre des forces de sécurité.
Il faut se rappeler que vers la fin de son règne, Omar Bongo ne portait pas Raymond Ndong Sima dans son cœur. Au motif qu’il avait eu maille à partir avec certains membres de sa famille, le patriarche l’avait banni. L’intervention de l’archevêque de Libreville auprès d’Omar Bongo Ondimba pour reconsidérer sa position n’y avait rien changé. C’est dans ce contexte que Raymond Ndong Sima comprendra qu’il n’aura de salut qu’en se lançant dans les affaires. Au cours de cette « traversée du désert », Raymond Ndong Sima sera accusé d’entreposer des armes dans son village. Il sera interpellé par les services de sécurité. Au bout d’une détention dans les geôles de ce service, il sera libéré faute de preuves.
Le jeune homme mentionné plus haut avait, lui aussi, été arrêté et mis sous mandat de dépôt dans la même affaire. Il aura moins de chance que l’ex-Premier ministre, car c’est au bout de 36 mois de détention qu’il sera enfin remis en liberté. C’est pour que l’Etat « le dédommage » que les forces de sécurité l’encouragent à ester en justice aujourd’hui. Cela aurait l’avantage de rouvrir cette affaire. Et bien sûr, d’entendre à nouveau l’ancien Premier ministre et toutes les personnes citées. De trouver au passage « par tous les moyens », des éléments qui pourraient confondre Raymond Ndong Sima. En matière de fabrication de preuves, on peut leur faire confiance. Ainsi, Raymond Ndong Sima serait inculpé et sans doute condamné, mettant un terme à son ambition politique.
Sauf que les services de sécurité ont sous-estimé une chose, la volonté du jeune homme de passer à autre chose. Il a refusé d’ester en justice contre l’Etat au tribunal d’Oyem. L’antenne du service d’Oyem a cru bon de le « transférer à Libreville », aux mains de la hiérarchie. Sans doute pour l’assurer que « le service sera à ses côtés dans cette bataille contre l’Etat ». En vain.
Mécontent de ne rien obtenir du jeune homme, l’officier lui aurait tout simplement demandé de repartir et de se débrouiller pour rentrer à Oyem. Il n’était plus question pour son service de payer le ticket retour au jeune homme. Sans ressources pour retourner, le jeune homme a dû recourir à la générosité de sa famille pour rentrer dimanche soir à Oyem.
Arthur Page