René Ndemezo’o Obiang adhère au Front
Le député de la commune de Bitam vient de claquer la porte du Parti démocratique gabonais (PDG). L’annonce a été faite le samedi 28 février dernier à sa résidence d’Akanda, au nord de Libreville.
René Ndemezo’o Obiang a fait une véritable démonstration de force samedi dernier lors de l’annonce de son départ définitif du PDG pour intégrer les rangs du Front uni de l’opposition pour l’alternance. Près de 2 500 personnes avaient envahi les jardins de sa résidence pour l’évènement. Tous sont venus par leurs propres moyens. Aucun transport des sympathisants du député de la commune de Bitam sur le lieu de la manifestation n’a été mis sur pied. Ils sont venus sans promesse d’un quelconque per diem comme cela se passe habituellement au PDG pour mobiliser.
Sans même l’assurance de pouvoir boire un verre d’eau ou manger un morceau. Beaucoup ont même commencé à vider les lieux sitôt la cérémonie achevée. Un responsable d’une agence de voyage installée à Bitam a confié à la rédaction qu’il avait observé une envolée de son chiffre d’affaires de manière « inhabituelle » quelques jours avant l’évènement. Des voyageurs occasionnels ne cachaient pas leur joie au moment de leur embarquement pour Libreville, indiquant à qui voulait l’entendre qu’ils « allaient à Libreville pour vivre un évènement historique ». Ces derniers, à-t-il assuré, « payaient eux-mêmes leurs titres de transport ». Cette foule immense a pris d’assaut la résidence de « René » très tôt dans la matinée.

Pour s’assurer une bonne place. Et ils n’ont pas eu tort, car dès 11 heures, heure initiale prévue pour le début de la manifestation, il était difficile d’accéder au domicile de René Ndemezo’o Obiang. Il était surtout impossible d’avoir une place assise. Plusieurs centaines de personnes ont dû se résoudre à suivre la manifestation debout, sous un soleil caniculaire.
Dans la tribune officielle, René Ndemezo’o Obiang a fait la preuve que les talents de rassembleur qu’on lui prête ne sont pas usurpés. Zacharie Myboto, Jean Ping, Casimir Oye Mba, Jean Eyeghe Ndong, tous des personnalités du Front, étaient assis à la même tribune que les membres de l’Union des forces de l’opposition pour l’alternance (UFA) conduits par Pierre-Claver Maganga Moussavou, et ceux de l’Union des forces du changement (UFC) conduits par Louis-Gaston Mayila. Ces personnalités qui se sont retrouvées de longues minutes dans le salon VIP de la résidence avant le début de la manifestation, en hommes courtois, ont, sans doute, voulu échanger afin d’installer un climat de dialogue qui, à termes, va sans doute amener ces trois groupes à unir leurs forces pour sauver le Gabon du chaos vers lequel le conduit la gouvernance d’Ali Bongo Ondimba.
C’est dans cette ambiance que l’ancien membre du comité permanent du PDG, vêtu d’un costume bleu royal, a prononcé une allocution qui fera date dans l’histoire politique du Gabon. L’émotion était à son comble. Lorsqu’après avoir posé son diagnostic sur la situation politique, économique et sociale, le député de Bitam va annoncer son départ définitif du PDG, la foule a explosé de joie. Cette expression doit se comprendre du fait que la totalité des sympathisants de René Ndemezo’o Obiang avaient depuis longtemps tourné le dos au PDG. Ils y sont restés par fidélité à un homme, René Ndemezo’o Obiang. Le fait que l’intéressé rejoigne par les actes la volonté de la majorité de ses sympathisants ne pouvait que faire tressaillir ces derniers de liesse. C’était presqu’à l’hystérie.
René Ndemezo’o Obiang va faire un pas supplémentaire pour rendre le bonheur de ses partisans total en annonçant dans la foulée son adhésion au Front. Tous s’attendaient à ce qu’il lance plutôt une association politique à cette occasion pour inscrire sa nouvelle démarche politique. Il a sans doute voulu, là aussi, être en phase avec la majorité de ses sympathisants qui avaient commencé à arpenter depuis longtemps les sentiers du Front.
Zacharie Myboto, Jean Ping et Jean Eyeghe Ndong, qui ont pris la parole après l’élu de la commune de Bitam, pouvaient, dès lors, exulter eux aussi. Ils savent qu’en ayant « René » avec eux, ils viennent de frapper un grand coup sur le plan politique. « C’est un stratège politique hors pair. Un débatteur redoutable », reconnaissent volontiers plusieurs hommes politiques qui se sont retrouvés en position d’adversité face à René Ndemezo’o Obiang.
Reste maintenant à transformer l’essai. Ce qui ne sera pas difficile au regard de la fuite en avant dans laquelle le régime s’est installé. Amenant au passage le député de Bitam à s’interroger si Ali Bongo Ondimba, qui se projette déjà en 2025 alors qu’il a été proclamé élu pour un mandat de 7 ans, avait encore les pieds sur terre. 2016 est plus que jamais engagé. L’annonce des prochaines arrivées au Front d’autres personnalités de poids du PDG place le Front dans une responsabilité particulière face à l’histoire, pour mener à terme ce combat pour la libération du Gabon.
Jean Michel Sylvain