EDITORIAL : Qu’a fait Jean de Dieu Ndoutoum-Eyi ?

Posté le 12 Mai 2015
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Par : Désiré ENAME

 

Une révélation. Comme cela se fait dans tous les journaux du monde. Une révélation, comme en ont l’art des journalistes qui ont décidé de s’engager sur le chemin ardu de la presse d’investigation ou « presse à billes ». Une révélation, comme seul sait le faire le patron du journal « Ezombolo ». Que de contenus de réunions secrètes il a révélé auparavant ! Pourquoi a-t-il fallu attendre cette énième révélation pour que le ministre de la Défense, Ernest Mpouho Epigat, sorte de ses gonds ?

En faisant arrêter une des meilleures plumes de la presse gabonaise, Jean de Dieu Ndoutoum-Eyi, au lendemain de la célébration de la journée internationale de la liberté de la presse, qui a eu lieu le 3 mai dernier, le pouvoir de sa petite majesté Ali Bongo Ondimba, via ses sbires, a décidé de faire un pied de nez à Reporter sans Frontières (RSF).

De son propre chef, son ministre de la Défense a ordonné aux éléments du B2 de coffrer le journaliste pour un article dans lequel il était cité. Et parce que le ministre de la Défense a estimé que cette info ne devait pas sortir. Juste ça ! Cet acte est du pur banditisme et d’une violence inouïe. Ce n’est que dans l’arène des voyous et des hors-la-loi que le maître mot pour régler un problème ou un conflit est le recours à la violence. Il n’y a que chez les soudards où l’argument de la force vaut plus que plus que la force de l’argument.

Ernest Mpouho Epigat n’a rien fait d’autre que montrer sa dimension réelle : celle de quelqu’un qui est resté coincé à une époque révolue, où le titre et ses atours étaient les seuls arguments pour impressionner et agir sur un citoyen lambda. A cette époque du parti unique où les Gabonais pouvaient se confiner au silence par crainte de représailles. Une époque où la loi se définissait par des quidams d’une république bananière, sans base d’éducation et, parfois, arrivés à des postes de responsabilité sachant à peine lire et écrire. Omar Bongo disait bien que d’un chien il pouvait faire un ministre. Pas étonnant que la descendance perpétue la dérision du pouvoir, en confiant l’exercice de fonctions prestigieuses à des personnes sorties tout droit des gangs de quartier.

Car, lorsqu’on a un peu de cerveau et que l’on peut soumettre ce minimum d’intelligence à de petits exercices de réflexion, on s’aperçoit, au moins, qu’il existe des limites dans toute action humaine. Surtout lorsqu’elle concerne autrui. Malheureusement, force est d’admettre que ce minimum requis est un exercice ardu pour celui qui a été placé par défaut à la tête du ministère de la Défense.

Cet homme, à n’en point douter, vient de commettre, au plan universel, la balourdise la plus inacceptable chez un individu, même classé parmi les plus ignares de ses semblables : priver une personne de liberté sans raison, pour ensuite le contraindre à dire le secret qu’il protège le mieux : ses sources d’information. C’est ce qu’il a voulu obtenir de notre confrère. Et ce, au mépris des lois sur la presse en République gabonaise. Il n’aurait jamais dû s’en prendre à lui de la sorte. Ernest Mpouho Epigat est décidément loin de la grandeur qu’on aurait pu attendre du tenant de la position. A la limite, cet homme est un danger pour la République.

En effet, si parce qu’un journaliste l’a égratigné, il se permet de façon aussi  arbitraire de le faire extraire de chez lui, de nuit, sans les formes juridiques qui s’imposent, qu’en sera-t-il lorsqu’un élève soufflètera son mouflet à l’école ? N’est-il pas à craindre que cet élève passe un mauvais quart d’heure au B2 ? Monsieur fait dans la loi du plus fort. C’est son genre. Le genre habitué à la lâcheté et à la fuite en avant. En somme, le genre du ministre parachuté, et qui est incapable de définir les axes de sa fonction, de les comprendre et de les assumer comme tels. La fonction ministérielle est si précieuse qu’elle s’accommode mal de la forfanterie.

Lorsque Jean de Dieu Ndoutoum-Eyi avait écrit que sa petite majesté n’était pas taillé pour le costume qu’il avait décidé de porter parce que trop étroit, on l’a menacé. Aujourd’hui, les lignes de couture sont en train d’éclater de partout. Lorsqu’on est sérieux, est-il possible de désigner Ernest Mpouho Epigat comme ministre de la Défense ? Non. Un président sérieux ne l’aurait jamais fait. Sauf dans un système de gadgétisation de l’Etat. Parce que, pour sa petite majesté, l’exercice du pouvoir est comparable à un jeu vidéo. Il suffit pour cela de regarder le niveau de son ministre de la Défense pour en juger. C’est ce dernier qui s’était « lourdement » fendu d’un communiqué pour signaler des mouvements inhabituels aux différentes frontières du Gabon. C’est le même qui montera la pièce de théâtre sur la découverte d’une cache d’armes dans un pays où des enquêteurs sont incapables de retrouver de petits cambrioleurs. Curieusement, à ce jour, le même ministre peine « lourdement » à dire aux Gabonais d’où venaient précisément les armes et qui en étaient les destinataires ? A croire qu’il est « lourdement » embêté. Le pauvre !

A cet homme, nul besoin de rappeler que dans le monde de la presse, lorsqu’on s’en prend à l’un, on s’attaque malheureusement à toute la profession. D’ores et déjà, la corporation est à ses trousses. Et ce sera sans répit.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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