Le gouvernement gabonais, contrairement aux assurances, ne parvient plus à payer la dette intérieure. Un homme d’affaires venu réclamer son dû vient d’être retrouvé mort dans un hôtel de la place.
1.100 milliards de FCFA. C’est le montant faramineux que l’Etat gabonais doit aux entreprises installées au Gabon. Elles ont commis la maladresse de faire confianceà l’Etat gabonais en acceptant de préfinancer sur fonds propres certains projets initiés par les émergents. Pour cesentrepreneurs, ont dû prendre comme de la provocation l’annonce du ministre du Budget, Christian Magnagna, dans le quotidien gouvernemental « l’Union », il y a quelques semaines, est une provocation. Le ministre a parlé d’un règlement de 540 milliards de FCFA opéré par le Trésor public en direction des entreprises privées au cours de cette année. La réalité est tout autre. Les entrepreneurs broient du noir. Et voila que cette situation vient de virer au drame. Austen Vachon, un chef d’une entreprise de 83 ans ayant travaillé comme fournisseur de biens et équipements au ministère de l’Education nationale, a été retrouvé mort dans l’hôtel où il était descendu à Libreville. Entre 2011 et 2012, l’homme d’affaires français était venu livrer au ministère de l’Education nationale des agendas de luxe. Depuis trois ans, il attendait d’être payé. Malgré plusieurs déplacements entre Paris et Libreville, ce chef d’entreprise n’a jamais perçu ne serait-ce que la moindre avance. Au début du mois de juin, selon notre confrère Gabonreview, un drame est survenu : Austen Vachon a eu un arrêt cardiaque dans sa chambre d’hôtel au nord de Libreville. Grâce à son fils et à sa fille venus de Paris au lendemain du décès, le Consulat de France a rapatrié son corps en fin de semaine dernière.
Un peu moins dramatique mais tout aussi inquiétant est la situation que vient de subir l’homme d’affaire franco-italien Guido Santullo, 81 ans, patron du groupe qui porte son nom. Le groupe a dûlicencier près de 300 ouvriers, et est en passe d’arrêter les chantiers qu’il a au Gabon. L’entrepreneur qui s’est plaint de ne plus avoir d’interlocuteur au sein de l’appareil d’Etat, avait,sur fonds propres, financé « …la réfection de l’un des ponts de Kango qui avait connu, en février-mars 2012, de très graves défectuosités. Le même groupe a construit le pont sur la Banio à Mayumba, et diverses autres infrastructures ». L’homme d’affaire aurait indiqué ne plus avoir d’interlocuteur au sein de l’appareil d’Etat. Car «ni le ministre du Budget et des Comptes publics, Christian Magnagna, ni le ministre des Travaux publics et des Infrastructures, Magloire Ngambia, ne le prennent plus au téléphone et ne le reçoivent plus lorsqu’il sollicite un entretien. » L’homme d’affaires a décidé de quitter le Gabon, même s’il a chargé le directeur général de son entreprise de continuer à harceler les membres du gouvernement cités plus haut, assure le confrère Gabonreview.
Comme si cela ne suffisait pas, Ali Bongo Ondimba ne parvient plus à payer ses fournisseurs en armement. Trois contrats avaient été signés le 29 octobre dernier, l’entreprise Piriou avait revendu l’ex-patrouilleur « La Tapageuse » à la marine gabonaise. L’affaire au Gabon avait été présentée à l’opinion comme acquise. Alors qu’il n’en était rien. Aux dernières nouvelles, le Trésor public n’avait toujours rien versé à l’entreprise française et le fameux patrouilleur est toujours à quai en France. Nexter, le fabriquant français de chars d’assaut, avait reçu une commande de l’Etat gabonais de 12 chars Aravisdont une partie devait équiper le contingent de militaire gabonais déployés en Centrafrique. Un spécimen a bien été présenté à Ernest Mpouho Epigat lors du dernier séjour d’Ali Bongo Ondimba en France. Mais jusqu’à lors, rien n’a été livré au Gabon faute de paiement. Enfin, l’entreprise SGF avait signé un contrat de formation de soldats avec l’Etatdu Gabon dans le cadre de la Minusca en RCA. Sauf que depuis, selon l’industriel, « il ne s’est pas passé grand-chose depuis novembre. La situation n’est pas stabilisée. C’est le statu quo.Les premiers versements n’ont pas eu lieu ».
La cote d’alerte est largement franchie. Il n’est plus question de faire la politique de l’autruche. Les tensions de trésoreries sont mises en lumière. Mais Ali Bongo Ondimba se comporte comme si tout allait bien. Jusqu’à quand ?
Par SYA