

Par : Désiré Ename
Dans son intervention lors de sa rencontre avec l’Association REAGIR à Paris et lors de ses interventions aux Etats-Unis, Jean de Dieu Moukagni Iwangou n’a ménagé aucun effort pour servir à ces interlocuteurs le bien-fondé de l’existence du Front et des autres coalitions de l’opposition ; et l’élan d’unité qui a cours entre ces différents groupes. Dans son propos liminaire au cours de sa récente conférence de presse, en parlant des enseignements de sa mission aux Etats-Unis, il dit : « (…) Le seul fait de l’invitation de l’opposition par la première puissance au monde montre que l’opposition gabonaise est devenue un interlocuteur valable. Dès cet instant, il lui reste à se constituer comme une alternative valable pour le pouvoir au Gabon. Pour y parvenir, il nous appartient de consolider notre unité, notre cohérence, et de formuler une offre politique à la hauteur des enjeux nationaux et internationaux. »
Nous en convenons avec lui. Former une unité d’action contre un adversaire commun est indispensable pour aborder l’avenir. Cette unité d’action est nécessairement construite aussi autour d’une unité de vision. Car il est indispensable que la vision d’avenir de ceux qui ont décidé de se mettre ensemble soit partagée pour atteindre les objectifs définis. Tout cela repose sur un socle de valeur. On ne cessera de rappeler qu’André Mba Obame (AMO), dans son adresse à la cathédrale Sainte-Marie, le 15 juin 2012, réduisait ce socle de valeur à trois mots : la Confiance, le Courage et la Loyauté. « Trois mots sans lesquels, disait-il, rien n’est impossible et avec lesquels tout est possible. La Confiance d’abord, la Loyauté ensuite, le Courage enfin. » Il disait pourquoi ces trois mots étaient indispensables.
« La Confiance. Nous devons avoir Confiance en nous-mêmes et dans ce que nous faisons. Donc ne jamais douter. Nous devons être en confiance avec cet autre qui n’est que le prolongement de nous-mêmes, cet autre à qui nous confions notre espérance, donc notre vie. Nous devons aussi faire confiance et ne point douter de l’autre. Cet autre qui lui aussi nous a accordé sa confiance, donc sa vie. C’est donc fort de votre confiance et en confiance au milieu de vous que je me suis toujours présenté à vous et qu’aujourd’hui encore je me tiens au milieu de vous.
La Loyauté. Oui la loyauté. La loyauté c’est l’honnêteté, c’est la droiture. Il suffit de regarder autour de nous, pour comprendre quatre ans après où nous conduisent le mensonge, l’imposture. Nous devons à notre pays d’être toujours loyaux. Nous le devons à notre pays, nous le devons à nos compatriotes, nous le devons à nos amis, à nos compagnons à nos familles.
Le Courage. Oui le courage. Le courage de dire non et de faire face, car ce que l’on fait est juste. Le courage d’être seul face à tous au nom de la vérité. Le courage de faire face, non pas pour soi, mais au nom du Gabon et de son peuple. »
Pourquoi revenons-nous sur cet épisode de la vie d’AMO ? Du fait, d’abord, de ce qui s’est passé à Bitam, où la mobilisation autour de la candidature de Patrick Eyogo a mis en évidence ces « trois mots essentiels » à l’action politique. La loyauté du bloc de l’UN ; le courage qui a animé René Ndemezo’o Obiang en mettant en jeu son histoire personnelle jusqu’à renoncer à se porter candidat pour retrouver son siège à l’Assemblée nationale. Il a préféré le céder à l’opposition, notamment à ses adversaires d’hier les plus farouches : l’UN. C’est cela la loyauté et la sincérité vis-à-vis de ses engagements et des compatriotes lorsqu’on a décidé de faire la route avec eux.
Ensuite, ces mots d’AMO questionnent aujourd’hui nombre de ceux qui se sont dit ses proches collaborateurs et qui ont violé et insulté sa mémoire. Jusqu’à la dernière minute, AMO s’est inscrit dans une dynamique unitaire, de responsabilité et d’engagement sincère. Bon an mal an, il avait fait des choix clairs. Qu’en est-il de ceux qui, prétendant être membres de l’Union nationale, ont combattu le candidat désigné par ce parti à Bitam ? AMO n’était certes pas d’accord avec tout ce qui se décidait en son absence. Mais au nom de la discipline, de la loyauté, de la confiance, et surtout de la sincérité de l’engagement, il se rangeait aux décisions prises.
Rappelons le libre propos de Thierry Obiang Ndong qui a fait jaser les mêmes qui ont choisi de servir les intérêts du PDG au détriment du camp de l’opposition. Ce dernier affirmait : « (…) Je suis fier de porter le projet de la Nouvelle Espérance et de défendre depuis 2012 son engagement sans faille pour la tenue d’une Conférence Nationale Souveraine, pendant que certains de ses plus proches compagnons de combat ont préféré parier sur sa mort, en se précipitant de lui trouver un remplaçant par ailleurs très éloigné de cette dynamique, au lieu de lui rester humainement solidaire et loyalement fidèle pendant ses années de souffrances. » Combien sont-ils, les proches d’AMO à même de reprendre à leur compte ces propos de cet autre proche d’AMO ?
Certains doivent comprendre que l’injure, le dénigrement et la médisance par personnes interposées ; commanditer des articles à « La Griffe » et dans d’autres officines proches du pouvoir ne feront jamais office d’arguments politiques convaincants. Ceux qui s’en servent pour penser booster leur cheval entraîneront plutôt très vite son essoufflement, et dans un proche avenir sa chute (…) voire sa disparition des écrans de la politique. Ce n’est qu’une question de temps. Question à deux balles : par quelle alchimie ceux qui criaient à hue et a dia être sur le terrain, y avoir implanté, selon leur comptage, plus d’une cinquantaine de cellules dans une contrée et se voir laminer par ceux qu’ils ont accusés hier de poltronnerie quant à leur engagement à faire du terrain ? Que ceux-là se disent qu’un complot, de surcroît écrit, peut se retrouver dans une boîte aux lettres à laquelle il n’était pas destiné. C’est à bon entendeur.
Jean De Dieu Moukagni Iwangou rappelle très souvent la cohésion du Front. Il rappelle à tout instant les priorités du moment, contenues dans la charte (Article 3) que tous ont paraphée : la destitution de sa petite majesté Ali Bongo Ondimba et la réforme des institutions comme seule condition d’obtenir des élections libres. C’est dans cet esprit de cohésion et de cohérence que le président de l’Union nationale, Zacharie Myboto, est allé arracher la victoire de son poulain dans la commune de Bitam.
« A l’Union Nationale, nous avons un idéal, celui de la démocratie dans un Gabon pour tous. Une exigence, la justice dans un Etat de droit. Et rien de cela n’est négociable. Rien. » C’est ce qu’a déclaré Patrick Eyogo Edzang, paraphrasant AMO, dans son adresse lors du meeting organisé par le président de son parti. C’est cela aussi la cohérence en politique.