

Par : Jonas MOULENDA
Monsieur le Président,
Qu’il vous plaise de prendre le temps de lire cette lettre et de réfléchir à son contenu. Même si je suis votre bête noire, souffrez de vous soumettre à cet exercice de lecture. Ensuite, vous aurez le loisir d’appliquer ou non mes suggestions. « Les conseils sont comme les papillons. On retient les uns ; les autres s’envolent », disait mon grand-père.
Depuis que vous vous êtes imposé aux manettes de l’Etat, le climat social et politique se dégrade dans notre pays. Les acteurs politiques et de la société civile passent leur temps à s’affronter à fleurets mouchetés, voire ouvertement. Les positions des uns et des autres se radicalisent. Il faut absolument un dialogue inclusif pour détendre l’atmosphère. Vous vous y montrez réfractaire parce que vous n’avez pas encore senti un réel danger. Mon aïeul m’expliquait que « l’antilope qui n’a pas encore vu le lion a sa manière de courir ».
Aujourd’hui, tous les ingrédients sont réunis pour l’implosion du Gabon. Pourtant, avant votre arrivée au pouvoir, il y faisait bon vivre. Rares étaient les citoyens qui s’exilaient. La majorité de ceux qui quittaient le pays, c’étaient les enfants qui allaient poursuivre leurs études. Mais, aujourd’hui, notre pays rebute ses citoyens. Quand ils sortent du territoire national, ils n’y reviennent plus. Environ 1 000 personnes, depuis 2009, se sont exilées. Cela se comprend dans une large mesure. « Quand le palmier prend feu, les tisserins se dispersent », disait mon papy.
Monsieur le Président, je commence à croire que vos pratiques diaboliques répandent une malédiction sur notre pays, pour en faire un pandémonium. Vous devez tout faire pour ramener la sérénité sur la terre de nos aïeux, devenue malsaine et polluée. Ne sacrifiez pas la paix sociale sur l’autel de vos appétits politiques et pécuniaires boulimiques. Si vous persistez sur cette voie sans issue de l’orgueil et de l’arrogance, vous en assumerez les conséquences. C’est un terrain dangereux sur lequel vous êtes en train de jouer. Mon grand-père disait : « Le buisson dans lequel tu cherches le bois de chauffage ne manque pas d’épines.»
II faut que vous pesiez du peu de poids qui vous reste pour préserver la paix sociale, qui n’est ni une faveur, ni votre héritage familial. Cessez de vous comporter en pintade orgueilleuse et acceptez le dialogue inclusif réclamé par toutes les forces vives de la nation. N’écoutez pas les conseils illusoires des profito-situationnistes, qui vous font croire que vous maîtrisez la situation. Quand ça tournera au vinaigre, c’est vous qui en pâtirez. « Les branches que casse le singe tombe sur le dos de l’éléphant », disait mon aïeul, grand chasseur de son époque.
Vous êtes en bisbille avec tous vos contradicteurs, y compris ceux qui ont l’âge de vos enfants. Pour leur nuire, vous ne mégotez pas sur les moyens. Mais vous êtes animé d’un esprit fielleux ! II faut que vous revoyiez vos modes d’intervention. Le Gabon appartient à tous ses fils et filles. Pourquoi vos pignoufs et vous-même voulez mettre le grappin sur le pays et écraser les autres fils ? Un président de la République doit avoir de la hauteur. A force de persécuter vos concitoyens qui ne sont pas dans la même arène que vous, vous finirez par vous nuire. Mon papy me prévenait que « celui qui poursuit le poussin finit par tomber ».
Que gagnez-vous en agissant de la sorte ? De la crédibilité ? Jamais ! Il est grand temps de mettre un terme à vos agissements tant décriés. Car ils constituent un obstacle rédhibitoire au progrès de notre Gabon. Comment voulez-vous que notre pays se développe si vous faites fuir ceux qui sont censés être les maillons de la chaîne de son développement ? Votre acrimonie ne fait pas avancer notre pays. Il contribue plutôt à le faire régresser. Vous le tirez par le bas, hélas ! Changer donc, de fond en comble, votre mode d’intervention. Mon grand-père me faisait comprendre que « le rat qui a les moufles n’attrape pas les souris ».
Du temps d’Omar Bongo, il n’y avait pas tant de haine viscérale. Il parvenait toujours à décrisper l’atmosphère par le biais du dialogue. C’est d’ailleurs son humilité qui lui permettait d’échapper aux chausse-trappes qui ne manquaient pas sur son chemin. Regardez tous les clignotants rouges qui s’allument sur votre chemin. Ce n’est pas en faisant contre la volonté populaire que vous resterez ad vitam aeternam au pouvoir. « Si le baobab est resté longtemps debout, c’est parce qu’il n’a pas cherché à résister au vent », m’expliquait mon aïeul à la sagesse avérée.