

Depuis le jeudi 13 août 2015, les employés de l’entreprise Nouvelle Gabon Mining (NGM), basée à Biniomi dans la province du Haut-Ogooué, observent un mouvement d’humeur. A ce jour, le départ pur et simple de Phil Mason, son directeur
général, serait l’unique préalable à la reprise du travail, a indiqué une source syndicale. Avant de préciser qu’un préavis de grève avait été préalablement déposé auprès de la hiérarchie avec des ampliations aux autorités locales. Ceci, selon le délégué syndical, traduirait le caractère légal du débrayage.
A la source de ce débrayage, les employés dénoncent la discrimination raciale dont ils déplorent être victimes. A titre d’illustration: «Nous les gabonais, buvons de l’eau des forages alors que les employés Sud-africains s’offrent de l’eau minérale et en offrent même à leurs chiens, alors que c’est nous qui constituons la force de production de l’entreprise », a déclaré un agent, visiblement en désaccord avec la pratique. Un autre employé de cette entreprise de droit gabonais opérant dans le secteur minier, a tout simplement qualifié Phil Mason «d’esclavagiste qui insulte sans retenue ses collaborateurs et méprise les lois du Gabon».
Outre la discrimination raciale, les agents fustigent entre autres : l’implication complice des autorités administratives locales, dont Gustave Charles Poyo, le préfet de la Mpasssa, et par ailleurs président du conseil d’administration, PCA, de NGM. Il est notamment soupçonné de passe-droits dans les recrutements à tour de bras de cadres et d’agents de la main d’œuvre. Pour corroborer, le syndicat des travailleurs évoque le cas de Ruth Poyo, secrétaire particulière du DG, du reste, fille du préfet. Secrétaire particulière avec un salaire faramineux , a-t-on appris, de 1 900 000 F CFA. Dans le même registre, on parle de deux autres femmes dont Annick Kouassam, une ivoirienne en situation vraisemblablement irrégulière au Gabon. D’aucuns jurent d’ailleurs à NGM, la main sur le cœur, que son recrutement a été à l’origine du licenciement abusif de l’ancien DRH. Celui-ci s’y était farouchement opposé, avant de finalement laisser des plumes.
Les mauvaises conditions de travail : le non respect du code de travail, des lois et règlements en vigueur au Gabon, sont légion.
Pour assujettir les employés, Phil Mason met à contribution son homme de main, Ismaël Prosper Kalenga, un ancien militaire recruté comme chef de la sécurité. Ce dernier, dit-on, aurait réalisé la prouesse d’obtenir un permis de travail sans carte de séjour. Il est ressortissant du Congo démocratique. Vendredi 14 août, lors d’une tentative de conciliation, dans le bureau du gouverneur de la province, « l’autorité » a fait l’étonnante découverte des situations irrégulières quasiment érigées en mode de gestion des ressources humaines à NGM.
Vaines tentatives de conciliation. Le mercredi 26, un certain Makita, conseiller spécial du chef de l’Etat, chargé de NGM, serait venu pour négocier et ramener la sérénité dans l’entreprise. Mais son initiative se serait heurté au refus de la hiérarchie de transporter les employés du siège social de Franceville au site de production à Biniomi. Entre-temps, une information erronée, visant à nuire les agents en grève, indiquait que ces derniers avaient barricadé la route.
Le mercredi 19, l’employeur a orchestré une situation de lock-out dans les négociations engagées. Ce jour-là, l’entrée au site de production était conditionnée à la signature d’une lettre d’engagement au respect d’un code de bonne conduite unilatéralement rédigé par la direction. Toute chose rejetée en bloc par le personne. Surtout qu’aucune disposition du code de travail ne le prévoit.
Au plus fort de ce mouvement d’humeur, grande a été la désolation des employés de NGM, le mardi 25 août. Accompagné par une importante délégation, le gouverneur de la province a tenu un discours de menace et d’intimidation à l’endroit des agents en grève. Ordonnant ainsi la reprise immédiate du travail. Faute de quoi les récalcitrants s’exposeraient aux mesures de licenciement et de poursuites judiciaires. Des propos relayés par le substitut du procureur. Au nom du parquet, il a cité l’article 344 du code du travail, en imposant pour sa part aux agents, une reprise sans condition des activités.
Face à cette somme de menaces et intimidations, les employés de NGM, membres du syndicat SYNATIEX ont plutôt décidé de durcir le ton. N’ayant pas trouvé d’oreille attentive à leurs revendications, ils se considèrent comme des laissés-pour-compte. Le dialogue étant surtout rompu avec le gouverneur.
Pour le personnel en grève, la reprise des activités est désormais synonyme de départ de Phil Mason de la tête de l’entreprise.
Henri Gauthier