DECES DE MATHIEU KEREKOU : l’Afrique amputée d’un démocrate éprouvé

Mathieu Kérékou
Mathieu Kérékou, de son vivant

Le décès lundi 14 octobre 2015 de l’ancien chef de l’Etat béninois, Mathieu Kérékou, à l’âge de 82 ans, sonne comme une perte immense pour l’Afrique, qui perd là l’un de ses rares dignes démocrates, dans un continent ou la fonction présidentielle est séquestrée dans des monarques sous les tropiques, moulés dans le déni de démocratie.

Lorsque le vent des mutations politiques d’Europe de l’Est souffle sur le continent africain dans les années 90, Mathieu Kérékou, alors président sous le régime du monopartisme en vogue en Afrique au sud du sahara, décide d’entendre raison en montrant la voie au reste du continent encore sous les ténèbres de la pensée unique. Fait historique, l’homme reste attentif aux préoccupations du peuple qui exige la tenue d’une conférence nationale souveraine pour redessiner le nouveau Bénin. S’élevant au-dessus des intérêts personnels, Kérékou s’ouvre au débat constructif en donnant au Bénin le prestige d’organiser dans cette fièvre des changements constitutionnels qui soufflent sur l’Afrique, la première conférence nationale souveraine de la phase post indépendance, c’était en 1989.

Démocrate, l’homme se retire du pouvoir sans sourciller, à l’issue de la présidentielle de 1991, organisée dans le cadre des recommandations de cette grand-messe nationale. L’homme se met quasiment en réserve de la république durant le règne du nouveau président démocratiquement élu, Nicéphore Soglo, avant son come back lors des présidentielles de 1996 et de 2001, qu’il emporte haut les mains, de façon démocratique. Un retour par la grande porte qui lui vaut le qualificatif de ‘’Caméléon’’, pour sa capacité à s’adapter dans toutes les postures politiques, confortables ou non, sans chercher le moindre du monde à tripatouiller la constitution à son profit. Signe des temps, il se retire, l’honneur sauf, du pouvoir en 2006, en s’abstenant de se présenter à la présidentielle de cette même année.

Les hommes politiques africains de sa trempe se comptent sur les doigts d’une main, à l’image des maliens Alpha Oumare Konaré et Amadou Toumani Touré.

Rien à voire avec la horde d’actuels cancres qui pullulent dans les présidences africaines, des personnages aux antipodes des normes démocratiques, visiblement nés après la honte.

Paul Davy

Article publié le 15 octobre 2015

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