

Par : Stephen Jean Landry
De l’intérêt actuel des révélations de Pierre Péan pour un empêchement du peuple à une nouvelle candidature d’ABO
Il ne fait aucun doute que le lundi 5 octobre, date de la publication dans Echos du Nord de la dernière interview de Pierre Péan, le volume de restitution déployé dans la presse sur la démission, deux jours plus tôt, de Jean-François Ntoutoume Emane a volé un peu la vedette aux nouvelles révélations du journaliste-écrivain. Des révélations pourtant de qualité. Qui viennent renforcer le doute toujours plus persistant sur la filiation biologique d’Ali Bongo avec Omar Bongo Ondimba. La quasi-absence de réaction du pouvoir montre que ce dernier a accusé le coup. Mais, plus surprenante, la non-exploitation par l’opposition, notamment par le FRONT.
Pierre Péan parle d’une sœur de sa petite majesté que la reine-mère, Joséphine Kama, aurait accouché, à Franceville, quatre mois après avoir mis au monde, par césarienne, Alain Bongo dans un Brazzaville en pleine guerre civile. Alain Bongo, officiellement, naît le 9 février 1959, la guerre civile crépite en fait les 16, 17 et 18 février de la même année. Cette sœur a un nom : Annick Okonkwo Ngonzi. Elle naît le 4 juin 1959, à Franceville. Depuis, elle a retrouvé ses parents biologiques, repris son patronyme et s’est mariée à un Nigérian. Happy end pour Annick, mais pas pour Ali
En effet, cette révélation ne peut que venir compliquer la clarification de sa situation administrative. Et, jusqu’aujourd’hui, il se heurte à trois voies sans issue. L’illégale retranscription de la mairie du 3e arrondissement de Libreville qui a produit un faux. L’acte de naissance commenté par Ben Simon dans le Monde, un autre faux. Le document de Nantes,un curieux extrait de naissance, dont l’unique signataire n’est pas l’officier d’état-civil, mais Albert Bongo, dont la signature, révèle P. Péan, diffère de celle qu’il avait utilisée pour parapher son acte de mariage avec Marie-Joséphine Kama Dabany, mais conforme à celle d’Omar Bongo devenu. Le troisième faux.
L’affaire Annick Okonkwo Ngonzi vient comme pour relever une évidence : il ne faut pas lâcher la question de ce faux et usages de faux. D’autant que si l’Opposition décidait de passer à une mobilisation pratique et massive des Gabonais sur cette question, le Gabon pourrait voir s’amplifier un mouvement d’empêchement populaire à toute tentative de représentation d’une candidature d’Ali Bongo à la présidentielle. Un empêchement populaire frappant sa petite majesté reviendrait à créer, dès aujourd’hui, une pression générale et nationale sur la question, en mobilisant les Gabonaises et les Gabonais, non pas seulement sur la nécessité de se préparer à la prochaine élection présidentielle ou d’attendre que les préalables pour la transparence soient réalisés à la convenance de l’opposition, mais surtout sur le fait qu’un sans papier ne saurait prétendre deux fois de suite à la présidence de la République. La position du FRONT sur la question est des plus claires. C’est au nom de ce regroupement Jacques Adiahénot que, le 19 juillet 2015, au Lycée Ntchoreret, relevait que la CENAP « […] a présenté, dans son dossier de candidature à l’élection présidentielle anticipée de 2009, un acte de naissance dont l’authenticité et la sincérité sont sujettes à caution [..]. En 1959, à Brazzaville, à l’époque, capitale d’un territoire de l’Afrique Equatoriale Française, Monsieur Ali Bongo Ondimba a produit en 2009, un extrait d’acte de naissance avec la mention « République Gabonaise », alors que le Gabon n’était pas encore une République, mais bien un territoire de l’AEF. C’est pourquoi […] il ne saurait être question que la CENAP prononce une fois de plus, la validité d’un tel extrait d’acte de naissance, dans l’hypothèse où l’intéressé serait à nouveau candidat à la présidence de la République. »
Les dernières révélations de P. Péan ne peuvent que conclure à une impossibilité de plus. Celle, pour ABO, de ne pas pouvoir produire un acte de naissance cohérent qui ne contredise pas le premier de 2009. L’autre impossibilité – qui, elle, intéresse l’opposition attachée à faire prospérer la forfaiture en justice est celle des institutions à la solde de l’Etat-Bongo. La troisième impossibilité concerne la communauté internationale qui ne saurait se positionner pour traiter ce problème à la place des Gabonais eux-mêmes.
Il reste donc la voie de la mobilisation massive des Gabonaises et des Gabonais qui ne pourront que compter d’abord sur eux-mêmes pour s’opposer au retour d’ABO à une nouvelle compétition électorale. Le Congo Brazza vient de nous démontrer qu’il ne faut peut-être pas attendre que les choses se fassent. Il faut parfois/souvent les anticiper. Certains observateurs affirment qu’une nouvelle candidature d’ABO signifierait non seulement sa volonté de se maintenir, mais aussi certainement son maintien, in fine. Le surgissement d’Okonkwo, grâce encore à P. Péan, rajoute lourdement aux difficultés de sa petite majesté et conforte le bien-fondé des accusations de l’opposition, notamment du FRONT, sur le sujet. Un sujet qui, à deux mois de l’année électorale, pourrait – on devrait prendre des allures préjudicielles.