

Par : Jonas MOULENDA
Chers compatriotes sous le drapeau,
Au moment où notre pays est à la croisée des chemins, un moment historique où le pouvoir finissant du président Ali Bongo Ondimba perd le nord, en tant que patriote préoccupé par les risques de son éventuel deuxième mandat, je juge utile de vous adresser cette philippique, afin que vous compreniez que l’heure est arrivée pour vous de faire le choix entre la patrie et l’oligarchie. « On ne fait pas le bonbon avec la nivaquine », observait mon grand-père.
L’heure est désormais à un véritable sursaut patriotique qui doit amener tous les citoyens, du plus petit au plus grand gardien de la République, à faire quelque chose pour sauver notre pays qui va à vau-l’eau. Depuis plusieurs années, vous vous êtes toujours rangés derrière l’oppresseur. Je ne sais pas pourquoi vous avez d’abord accepté de prendre part à ce jeu peu glorieux, alors que l’armée doit être au service du peuple. Maintenant, prenez-en conscience. Ne persistez pas dans l’erreur. Mon aïeul disait : « Si tu tombes dans le feu, ne t’enroule pas dedans. » Le destin de notre pays ne dépend plus que des citoyens dignes et honnêtes. Faisons preuve de notre maturité et organisons notre armée pour en faire une armée prête à défendre le Gabon en toute dignité. Que l´armée décide de barrer la route à tous les « anges » du mal qui nous apportent la division et la haine entre nous. Généraux, colonels, commandants, capitaines, lieutenants, autres officiers et soldats de toutes classes de l’armée, prenez vos responsabilités, pour éviter le désastre à notre pays. Ne vous contentez pas des galons et autres friandises que le régime vous donne. Ils ne régleront pas définitivement vos problèmes. « On ne gave pas un chameau en le nourrissant à la cuiller », relevait mon papy.
L’armée doit s´organiser pour assurer ses missions républicaines. Si aujourd’hui Ali Bongo Ondimba veut se maintenir à la tête du pays, qu’il lutte avec son parti politique afin que le peuple vote pour lui démocratiquement, au lieu de compter sur l´armée, qui appartient au peuple. Que l´armée soit maintenant républicaine pour défendre son pays et non tirer sur le peuple dont elle est le bouclier. Chers compatriotes sous le drapeau, relisez vos cours pour ne pas oublier vos missions régaliennes. Mon papy disait : « Si on te critique à cause de ton chien, appelle-le lorsque tu pars au champ. »
Les armes dont vous disposez sont un moyen de dissuasion à l´intérieur du pays et de défense contre les ennemis venant de l’extérieur pour attaquer notre pays. La communauté internationale vous laisse faire aujourd’hui, mais plus tard, elle vous accusera et vous traitera de criminels de guerre ou d´avoir commis des crimes contre l´humanité. Nous voyons, de nos jours, tous ceux qui sont poursuivis pour avoir commis des crimes contre la population. Tirez les leçons de ce qui se passe chez les autres. « Si tu vois la barbe du voisin prendre feu, tu peux tremper la tienne dans l’eau », me conseillait mon grand-père.
Vous avez aussi des enfants et vous ne savez pas comment ils vont évoluer et où. Ceux qui n´ont pas d´enfants ont aussi un proche ou un membre de leur famille qui désirera être partout où sont les Gabonais sans crainte. A cause de la situation désastreuse que traverse notre pays, les Gabonais sont désormais éparpillés partout dans le monde. Ils veulent bien revenir, mais ils ont peur par ce que chacun a un problème avec un membre du clan mafieux que vous soutenez. Ils ne peuvent pas retourner dans un pays pris en otage par des oligarques aux élans revanchards. Mon grand-père me faisait remarquer que « la souris ne va pas jouer au salon du chat ». Les gouvernants qui pillent notre pays vous dressent contre le peuple pour assurer leur longévité politique. Alors qu’on dilapide des milliards au sommet de l’Etat, combien de vos frères d’arme ne sont-ils pas morts d’une courte maladie par manque d’argent pour se soigner ? Combien d’entre vous arrivent à joindre les deux bouts ou à envoyer quelque chose aux parents restés au village ? Combien d’entre vous ne souhaitent pas que leurs conditions de vie s’améliorent ? Combien d’entre vous n’aimeraient pas posséder en propre une maison décente ? Le luxe dans lequel nos dirigeants vivent doit attiser vos rancœurs. « Si tu as pour ennemi le vautour, n’attache pas les intestins de la poule autour de la tête avant d’entrer dans la forêt », me prévenait mon papy.
Chers compatriotes sous le drapeau, donnons-nous la main, dans l’intérêt du seul Gabon et non dans celui d’une minorité au pouvoir, qui prend tout et qui nous divise. Il n’y a pas de temps à perdre. C’est maintenant qu’il faut se joindre au peuple. Car lorsqu’on ne consent pas une vilenie, on ne doit pas s’y résigner. Dans certaines situations, le silence est un crime. Le clan mafieux qui est au pouvoir commence déjà à jubiler parce qu’il compte sur votre appui. Faites-le déchanter. « C’est le jour où le bouc se réjouit qu’on le castre », m’expliquait mon aïeul, grand éleveur de son époque.
Article publié le 11 Janvier 2016