
Par : Désiré Ename
Celui de la restructuration ? Celui des enjeux électoraux ? Tout se dira ce week-end, quand ce parti organisera pour la première fois ce rassemblement statutaire, six ans après sa création, marqué par une dissolution dans son onzième mois d’existence ; et tout juste un an après sa réhabilitation.
Mais ce congrès aura aussi un tout autre symbole important, car il se tient à quelques jours de la commémoration du décès d’André Mba Obame, le 12 avril prochain. Ce sera un congrès à grands enjeux.
Ces enjeux se disent d’abord dans ce qui, pendant des années, a donné arguments et arguties à un groupe de personnes estimant que les leaders de l’Union nationale (UN) avaient abandonné le terrain, viciés et sclérosés par la réunionite. Argument tenable dans le cadre de l’existence régulière d’un parti politique. Mais sans fondement dans le contexte d’un parti dissous, où les leaders avaient mis le paquet sur la bataille pour sa réhabilitation. Une option nécessaire dans ce contexte.
On pourrait se demander quel sens a l’occupation du terrain pour une organisation sans reconnaissance juridique ? A quoi aurait concrètement abouti une activité de terrain ? Combien de militants courageux étaient capables d’animer une cellule et d’affronter les assauts d’un pouvoir brutal, autiste et aveugle ? En plus, il est prouvé que les militants d’un parti politique montrent leur motivation quand ils peuvent clairement s’identifier à un groupe. Or, la dissolution de l’UN avait clairement démobilisé ses troupes. De ce fait, pouvaient-ils se déployer sans bannière ? Autant de questions auxquelles on peut ajouter d’autres.
Il va alors sans dire que la bataille qui était à mener était incontestablement celle de la réhabilitation. Pour ce faire, l’idée de porter la cause de ce parti devant les juridictions tant nationales qu’internationales lui a été bénéfique. Et l’on peut affirmer que c’est sous la pression internationale que le pouvoir de sa petite majesté a été amené à infléchir ses positions. Une victoire de taille. Contrairement à l’interprétation de certaines personnes, la réhabilitation de l’UN ne visait pas à activer une bataille d’ego. A telle enseigne que certains ont prédit une guerre d’hégémonies entre les partis politiques du Front. L’histoire leur donne tort. Le fait est que le regroupement du Front, dirigé par Pierre André Kombila, concentre ce que le Gabon compte de partis politiques les mieux structurés. Et peu importe leur rayon d’action, l’harmonie y règne.
Pour revenir au congrès de l’UN, il faut croire que celui-ci devra amener ce parti à mieux asseoir ses structures à travers le Gabon. Et se doter ainsi d’une base forte. L’UN aura ainsi quitté une construction au sommet, autour de personnalités et leurs chapelles, émanant de sa constitution, le 10 février 2010. Lors de ce congrès, les militants devront donc choisir leurs nouveaux leaders dans les différentes strates, et parachever son organisation.
Il restera les questions de l’heure. L’UN devra-t-il, à ce congrès, désigner un candidat ? Nous pensons que non. D’abord pour donner un sens au débat de l’heure dans lequel cette organisation s’est portée aux premières loges. Ensuite, parce que ce sera aller à l’encontre de l’esprit de la déclaration du 19 juillet 2014, lors de la constitution du Front. Certes, cette déclaration reconnaissait le timing électoral, mais elle n’a pas fait mystère des conditions dans lesquelles cette élection devait se tenir : une remise à plat des instruments qui l’accompagnent, afin de la crédibiliser ; mais aussi la clarification de l’état civil d’ABO. Or, sur ce second volet, plus les mois passent, plus son état civil pose problème quant à la crédibilité des documents qui s’enchaînent, sans compter les révélations autour. Par exemple, une sœur qui naît tout juste quatre mois après lui. Et aujourd’hui, Nantes vient d’être saisi pour l’ouverture d’une instruction. Ce qui compliquera la situation de sa petite majesté tropicale.
Dès lors, est-il utile de s’engouffrer dans le calendrier électoral, qu’au forceps ABO tente de glisser en toute inconvenance ? Le bon sens appelle à la cohérence. Et, pour paraphraser Chantal Myboto-Gondjout, à quoi sert une élection dans laquelle les dés sont pipés? Ne convient-il pas plutôt de bouter l’intrus dehors pour que la maison Gabon se reconstruise ?
L’UN devrait tout au plus ouvrir la voie à des candidatures à la candidature. Arrêter un calendrier pour la circonstance et désigner son candidat suite à cela…et dans un délai raisonnable. Auquel cas, comme l’ensemble du Front, elle ne saurait ne pas susciter des questions sur la cohérence des batailles qu’elle a décidé de mener aux côtés de ses pairs. Il va sans dire que dans le discours populaire aujourd’hui, l’impératif de destitution a plus convaincu qu’autre chose.
Quant à ceux qui pensent que l’UN est vidée de sa substance, leurs errements en disent long sur leur inculture de la culture des partis politiques.
Article publié le 23 Mars 2016