Parmi les sujets soigneusement évités par Bongo Ondimba Ali, alias Boa, depuis l’ouverture de sa campagne comptant pour la présidentielle du 27 août prochain, il y a l’exécution du budget de l’Etat depuis 2009. Celui-ci se chiffre à 18.000 milliards de francs Cfa pour la période comprise entre 2009 et 2015. Des ressources largement suffisantes pour réaliser des investissements structurants, engager la nécessaire réforme de l’Etat et organiser une meilleure redistribution des richesses. Il aurait fallu, pour cela, que le budget de l’Etat ait été exécuté dans les normes durant cette période. Ce qui est loin d’être le cas. Depuis 2009, le budget de l’État n’a été exécuté qu’à plus ou moins 50%. Mais, bien malin qui pourrait en déterminer la proportion d’exécution.
Du côté des ministères des Finances et du Budget, l’on reste évasif quant à la destination souvent prise par les crédits dégagés. Chaque fois, tout s’est passé sous le regard impassible de la Cour des comptes, de l’Inspection générale des finances et le Parlement qui ont pourtant mission, comme le leur confèrent les articles 122 et 125 nouveaux de la loi 5/85 du 27 juin 1985, d’assurer des contrôles du budget de l’Etat, l’exécution dudit budget et la gestion des agents en charge des questions économiques. Pour rappel, l’exécution du budget est encadrée par la loi 5/85 du 27 juin 1985 portant règlement général sur la comptabilité publique de l’État dont l’article 101 nouveau stipule clairement:« Les engagements de dépenses s’imputent sur les crédits du budget de l’année en cours. Ils stipulent l’exécution du service le 31 décembre au plus tard de cette même année (…). Les engagements, dont l’exécution du service prévue pour le 31 décembre au plus tard n’a pu intervenir, sont réimputés d’office sur les crédits du budget de l’année suivante. En cas de non-reconduction de la ligne budgétaire au titre de laquelle la dépense aurait dû être payée, l’imputation est fixée par décision du ministre chargé des Finances ».
En sept ans de mandat, Boa et ses émergents n’ont jamais communiqué véritablement sur le niveau d’exécution du budget, pas plus sur la part de crédit en moyenne qui doit être réinjectée dans la Loi des finances des années suivantes. Selon les rapports économiques et financiers qui accompagnent souvent les différentes Lois des finances depuis 2009, l’on constate que seulement 51% des recettes et 54% des dépenses de l’Etat sont exécutées. Cela traduit le financement des dépenses non-prévues dans le budget encore appelé hors-budget, une pratique contraire à l’orthodoxie financière. Conséquence de ce flou artistique : une pléthore de projets industriels et d’aménagement du territoire qui sont à l’arrêt ou qui n’ont jamais démarré. Il en est ainsi, par exemple, du projet d’électrification du pays par la construction de plusieurs barrages hydrauliques et l’interconnexion du réseau électrique national totalement à l’arrêt ; les projets annoncés tambour battant des barrages de Fe-2 à Mitzic, de l’Impératrice Eugénie à Fougamou et des chutes de Koungou dans l’Ogooué-Ivindo; les projets d’exploitation du Fer de Bélinga et des terres rares de Niobium à Lambarené. Ou encore, la construction de nouvelles universités à Mouila, Port-Gentil et Oyem. Des projets qui, comme le redoutaient certains observateurs avertis, n’ont pas vu le jour car leur réalisation nécessite des inscriptions sur plusieurs exercices budgétaires et ce, sans interruption, au vu des maquettes produites.
Markky Edzang Zuè
publié le 22 aout 2016