Un reporter du Monde Diplomatique venu couvrir la situation postélectorale au Gabon a été refoulé samedi à l’aéroport de Libreville, faute de visa, et plusieurs autres journalistes français se sont vus refuser l’entrer au Gabon, théâtre de violentes émeutes depuis l’annonce de la réélection d’Ali Bongo à la tête du pays.
Alors que la situation postélectorale défraie la chronique aussi bien nationale qu’internationale, le journaliste Olivier Piot s’est vu refuser l’entrée samedi soir sur le territoire gabonais pour absence de « justifications probantes » sur les conditions et la durée de son séjour au Gabon, selon la décision consultée par l’AFP. Il est bien vrai qu’Olivier Piot n’avait pas de visa mais était « en négociation avec le ministère de la Communication depuis une semaine », a expliqué le journaliste lundi à l’AFP. « J’ai reçu un mail samedi qui m’invitait à me présenter à Libreville, en me disant que j’aurais l’accord de visa sur place« , a-t-il déclaré. Arrivé à l’aéroport de Libreville, il a été refoulé par les douaniers, conformément aux recommandations contenues dans un document posé sous le comptoir, qu’il a d’ailleurs pris en photo.
A l’annonce de la victoire du président sortant Ali Bongo à l’élection présidentielle du 27 août dernier, des émeutes meurtrières et des pillages massifs ont été observés sur l’ensemble du territoire national. Le peuple gabonais qui avait déjà connu des crises postélectorales n’avait jamais été victime d’autant de violences. Le gouvernement, en plein déni de la situation, parle de trois morts, alors que l’opposition évoque plusieurs dizaines de victimes. Une réalité qu’Ali Bongo et ses sbires veulent bien cacher à la face du monde.
C’est sans doute pourquoi plusieurs autres journalistes français se sont vus refuser l’autorisation d’entrée au Gabon afin de couvrir les tensions évidentes qui planent sur le pays depuis la déclaration de la soi-disant victoire de Bongo Ondimba Ali, ou BOA.
Le quotidien Libération, qui avait déposé une demande de visa en juillet, n’a toujours pas reçu de réponse de la part de l’ambassade du Gabon, a précisé à l’AFP Johan Hufnagel, directeur adjoint du journal.
Plusieurs radios françaises ont réussi à obtenir des visas, mais pas pour la période qu’elles souhaitaient, a souligné sous couvert d’anonymat un journaliste de radio qui a tenté de venir au Gabon. Auteur en 2009 d’un article jugé irrévérencieux, suivi cette année-là d’un refus de visa, le reporter de L’Express Vincent Hugueux a affirmé ne pas avoir non plus pu revenir dans notre pays. « Le Gabon a accrédité plusieurs journalistes français qui ont pu partir. Quels sont les critères de tri‘ », demande Olivier Piot, dénonçant « une stratégie de contrôle des médias par les accréditations ».
« C’est Le Monde Diplomatique qui est directement visé« , assure Olivier Piot. Le mensuel, marqué à gauche, avait publié en 2014 une tribune de l’opposant gabonais Jean Ping.
Aria Starck