C’est dans l’indifférence totale que Bongo Ondimba Ali, alias BOA, a prêté serment pour un second mandat. Dans les quartiers, tout comme dans les rues de Libreville, la liesse n’a pas été observée chez ses partisans. Même dans les salons feutrés, il n’y a pas eu de signe de joie manifeste. Dans le ciel, à peine apercevait-on quelques oiseaux. Par contre, l’on constate que des avions de guerre survolent la voûte céleste depuis plusieurs jours. Dans quel but ? Le calme qui règne dans la capitale gabonaise est plutôt celui d’une ville en deuil. « Le Gabon est mort ! Le pays est assassiné doublement par les Bongo et leurs fidèles ! Nous sommes en deuil ! Voila la vérité ! », a déclaré simplement Minko Blaise, un septuagénaire résidant à Bikélé, dans la périphérie de Libreville.
Le sujet en lui-même est presque tabou : personne ne veut parler de cette réélection que les Gabonais, dans leur écrasante majorité, ont en travers de la gorge. N’eut été la présence très renforcée des forces de l’ordre de troisième et quatrième catégories dans les grandes artères de Libreville, et la retransmission en direct de la cérémonie de prestation de BOA sur Gabon Télévision, Gabon 24 et Télé Africa, personne n’en aurait dit mot. « Vraiment ! Ils vont nous diffuser ça jusqu’à quelle heure ? », ne cessait de pester un habitant des Charbonnages, quartier semi-résidentiel du premier arrondissement de Libreville. Chacun vaquait à ses occupations, sans prêter attention au simulacre, organisé à la hâte, qui se déroulait au Palais du bord de mer. « On n’a pas que ça à faire. Ils ont eu leur réélection, qu’ils fêtent alors. Pourvu seulement que ça dure ! », maugréait une commerçante du célèbre marché de Nkembo.
La cérémonie d’investiture ressemblait elle-même à un véritable bal des vampires, du fait, tout d’abord, de cette odeur d’encens qui embaumait l’intérieur du salon d’honneur du Palais du bord de mer. Les effluves d’encens étaient si forts qu’on se croyait non pas à une cérémonie d’investiture du Président de la République, mais plutôt à un rituel mystico-ésotérique. Puis, du fait de la présence des profito-situationnistes tels que Raymond Ndong Sima, Bruno Ben Moubamba, Dieudonné Milama Mintogho et Gérard Ella Nguema, des soi-disant opposants qui ont vite sauté sur l’occasion pour aller monnayer leur soutien à BOA. Des convives dont la présence à cette cérémonie n’a pas vraiment étonné dans l’opinion : « Leur trahison pendait au nez ; seuls les aveugles ne l’ont pas vue. Ce sont des traîtres qui devront, eux aussi, répondre de leurs actes le moment venu ! », a averti un notable du quartier Kinguélé, dans le troisième arrondissement de Libreville. Leur présence, plus que probable, dans le futur gouvernement en gestation n’étonnera pas le citoyen lambda. Excepté Raymond Ndong Sima, ancien premier ministre, le moment n’est-il pas arrivé pour eux aussi d’aller à la « mangeoire » ? A cette question, nous attendons la réponse de Mathieu Mboumba Nziengui, leader d’une aile de l’UPG et ministre d’Etat dans le gouvernement démissionnaire du Pr Daniel Ona Ondo.
Markky EDZANG ZUE
publié le 29 septembre 2016
