Qui menace la paix ? Qui crée la division ? Qui fonde le tribalisme ?
Par Désiré Ename
En voulant pointer un doigt accusateur sur Jean Ping au sujet des exactions commises lors des émeutes suite à l’annonce des résultats électoraux par le Ministre de l’Intérieur, Bongo Ondimba Ali a voulu profiter d’une confusion. Une fois de plus, pour brouiller la vérité des faits. Mal lui en a pris. Son clan, que Séraphin Moundounga, (lire ITW) appelle « la caste des fondamentalistes » est là malheureusement pour faire ravaler à BOA ses accusations.
Le meilleur de la « caste des fondamentalistes », Brice Lacruche Alihanga, brillant financier, s’est fendu tout dernièrement au Pont d’Akébé d’actes et de propos qui clamaient haut et fort le sectarisme ethnique, la division, et incidemment la mise à l’indexe d’autres communautés. C’était à l’occasion d’une marche en guise de riposte des « Altogovéens» suite à des pillages qui n’ont jamais eu lieu à cet endroit. Chantre de l’exclusivité altogovéenne, Brice Lacruche n’a pas insinué autre chose dans sa démarche au Pont d’Akébé, vu comme le fief des ressortissants de cette province, que de la revendiquer. BOA est édifié sur la volonté de ses lieutenants à saper les bases de la convivialité qui fonde le vivre ensemble au Gabon, au profit du repli identitaire.
Cela n’a pas commencé qu’avec lui. Au cour de cette période électorale, l’on a entendu des cadres de cette province justifier, par des arguties, les magouilles électorales en se fondant sur un pseudo repli identitaire parce que Jean Ping aurait parlé de « cafards » dans une de ses interventions. Alors qu’il ne s’agissait nullement des ressortissants de cette province. Voire que cela ne se référait à aucun groupe ethnique.
En réalité le but de cette sordide manœuvre est de préserver les fausses données électorales attribuées à la province du Haut-Ogooué. A savoir un taux de participation de 99% assorti d’un score de 95%. D’où la volonté de BOA et des siens de soulever la fibre ethnique à tout va. Cela ne prendra pas. Parce que les Altogovéens eux-mêmes s’y opposent. Parce que un nombre de ressortissants du Haut-Ogooué ne se reconnaissent pas dans les calculs d’une « caste de fondamentalistes » avides de pouvoir. Et obsédés par la préservation de quelques prébendes et strapontins.
Il y a quelques jours, ce sont deux jeunes dames, filles de feu Mpouhot Epigat, ancien ministre de la Défense et des Hydrocarbures qui l’ont fait savoir. Elles ont dénoncé ces travers. Mais mieux, Arlette et Joelle Mpouho ont dit ce qu’est le Gabon indivisible. Ce Gabon qui est riche de sa diversité ethnique et culturelle. Ce Gabon qui se situe au-delà des privilèges de quelques uns. C’est au nom de cela, fondé sur les valeurs humaines, elles ont soumis cette « caste de fondamentalistes » au verdict de la vérité et de l’histoire. Il y a un temps pour tout. Il y a eu un temps pour le pouvoir, il y a aussi un temps pour comprendre que le pouvoir n’est pas éternel. La voix de ces jeunes dames sort en échos à celle de beaucoup d’autres Altogovéennes et Altogovéens qui refusent d’être les otages d’un groupe, « la caste des fondamentalistes et profito-situationnistes » qui a accaparé les moyens de tous pour se les répartir uniquement qu’entre eux. La voix de ces jeunes dames, jointes à celles de beaucoup d’autres avant elles, défait la logique de chasse gardée, et partant la logique du réservoir de voix visant uniquement à saper l’expression du suffrage des Gabonais pour ainsi conforter la logique de l’exercice sectaire du pouvoir. Quitte à mettre le feu au pays. « «À quoi joue Laccruche Alihanga ? Cherche-t-il à créer une tension ici ? Il file en tout cas le mauvais coton du provincialisme, voire de l’ethnisme. Toutes les ethnies vivent en bonne intelligence ici à Akébé 2. Qu’est-ce qu’on veut nous faire croire ?» a renchéri une dame citée par notre confrère GabonReview. A cette question on ajoutera : A quoi joue BOA ?
L’on se souviendra que ce dernier s’était fendu le 13 septembre 2012, d’une demande inédite à l’Assemblée nationale, celle d’une loi contre la xénophobie et le tribalisme. Le président de l’Assemblée nationale de l’époque, en connaisseur de la réalité du terrain s’était interdit à y donner une suite. Et là, magistralement, celui qui passe pour le champion de l’unité national est dans le déni de la reconnaissance aux autres Gabonais que sont Jean Ping et autres des droits dans la province dont il dit être originaire. Pourquoi Ping n’aurait-il pas droit à ses voix à Akiéni, Bongoville, Lékoni et ailleurs ? Simplement parce que BOA et sa caste en ont décidé ainsi. Et non pas les Altogovéens dans leur ensemble. Il se sert d’un atavisme profond, ce tribalisme primaire, ancré chez des membres de sa caste de fondamentalistes profito situationnistes pour ré-exister. C’est sa nature profonde. Parce que lui, BOA n’a aucune attache avec le Haut-Ogooué. Il n’est initié dans aucun rite. Car les codes d’une initiation – Ndjobi ou autre- se transmettent dans la langue vernaculaire. Or BOA don’t speak Téké.
Résultat des courses celui qui argumentait sur la préservation de l’unité nationale par une loi sur la xénophobie et le tribalisme est aujourd’hui celui là même qui se sert du repli identitaire, du tribalisme en divisant pour régner. C’est lui qui menace la paix.