Présidentielle 2016 : Le pré-rapport de l’Union africaine accable la Cour constitutionnelle et la Cenap Par DE

Posté le 18 Nov 2016
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flag_of_the_african_union_2010A quelques jours de la publication du rapport très attendu de la mission d’observation de l’Union européenne, le pré-rapport des juges constitutionnels africains, envoyé par l’Union africaine(UA) auprès de la Cour constitutionnelle du Gabon pour les aider « à recompter les voix » de l’élection présidentielle du 27 août dernier, a opportunément fuité dans la presse. Votre journal « est tombé » sur ce document deux jours avant que Radio France internationale (Rfi) n’en parle. Le média français affirme l’avoir authentifié et précise que la mouture finale de ce document n’est pas différente du document officiel. Sa lecture laisse pantois. On croirait parcourir le rapport du Réseau des organisations de la société civile pour la bonne gouvernance au Gabon (Rolbg). Tant leurs conclusions respectives présentent la même chute : BOA n’a pas gagné l’élection présidentielle du mois d’août dernier.
On se demande bien pourquoi Idriss Deby Itno, le président en exercice de l’UA s’est empressé de reconnaitre l’élection de BOA sans tenir compte de l’avis motivé de ses experts dépêchés à Libreville. Les juges constitutionnels africains qualifient « d’invraisemblables » les procès-verbaux de l’élection dans la province du Haut-Ogooué. Une telle remarque venant des juges togolais Mipam Nahm Tchougli et tchadien Nagoum Yamassoum, des personnes qui en savent un rayon en matière de trucage des résultats des élections, voudrait dire qu’ils ont été en face d’un cas de fraude qu’ils n’ont jamais rencontré dans leurs pays. La Cour constitutionnelle gabonaise et la Commission électorale autonome et permanente (Cenap), sûrs de leur puissance, n’ont pris aucune précaution minimale pour essayer de camoufler leur forfait. Ils ont agi comme un tueur amateur qui laisse de nombreuses empreintes sur le lieu du crime. Au point que la fraude est visible à des kilomètres. Les PV de la province du Haut-Ogooué « … sont si bien rédigés, ordonnés », avec la coïncidence entre « le nombre d’inscrits, celui des suffrages exprimés et leur attribution quasi-totale à un seul candidat », se sont étonnés malgré eux les juges africains. Les PV du Haut-Ogooué « sont tellement parfaits » que Rfi a cru devoir présenter cette province comme « une exception douteuse ». En langage non diplomatique, cela veut dire que les experts de l’UA doutent de la régularité de l’élection dans cette province. C’est-à- dire qu’ils ne croient pas que BOA soit sorti vainqueur de ce processus. Naturellement, ils ne pouvaient pas l’écrire comme tel sans déclencher le courroux du syndicat des chefs d’Etats africains – l’UA -. D’autant qu’au commande de celui-ci trône Idriss Deby Itno, un personnage dont l’élection tout aussi contestée. Malgré tout, ils ont suggéré au syndicat « … de différer la proclamation des résultats par la Cour constitutionnelle ». Ce qui sous-entend laisser du temps à la négociation pour convaincre à BOA que sa tentative est suicidaire. Les experts n’ont évidemment pas été suivis sur cette recommandation, malgré sa pertinence.

Les réactions à Libreville n’ont pas tardé selon Rfi. Ce qui en dit long sur ce que ce sera à l’issue de la publication du rapport de l’Union européenne. Le camp de Jean Ping par l’intermédiaire de Jean Gaspard Ntoutoume Ayi, ancien porte-parole du candidat, a accusé l’UA de « forfaiture ». L’organisation a agi non pas dans l’intérêt du peuple gabonais, mais dans sa logique qui consiste à protéger avant tout les dictateurs africains. Dans le camp de BOA, c’est le cyber avocat Francis Nkéa, désormais ministre en charge des relations avec les institutions, qui a répliqué. Pour lui, l’UA devrait plutôt féliciter les scrutateurs du Haut-Ogooué pour la qualité de leurs procès-verbaux. Mais dans tous les cas « l’élection est derrière nous » a-t-il conclu.

Reste que, pour BOA, l’effet est désastreux dans tous les sens du terme. Cela va également déteindre sur tous les dirigeants qui se sont empressés de reconnaitre le fait accompli. Ban Ki-Moon, le secrétaire général de l’Onu, en tête. Le très corrompu Ibrahim Boubacar Keita, le président malien ensuite. Au lieu de se préoccuper de la sécurité dans son pays où les djihadistes continuent de dicter leur loi, l’homme a trouvé le temps de venir personnellement à Libreville pour féliciter BOA. Macky Sall aussi, le président élu démocratiquement du Sénégal. Malgré l’avis critique de son principal opposant Idrissa Seck, il est venu souiller l’honneur de la démocratie sénégalaise en participant à cette forfaiture. Le pré-rapport de l’UA lui revient à la face comme un boomerang. Sans oublier Faure Gnassimbé, un abonné des putschs électoraux. Il sait désormais qu’à la prochaine tentative, l’UA sera aussi ferme contre lui. Le cas le plus problématique est celui de la France. Manuel Valls est rattrapé par ses turpitudes. Il aura maintenant le plus grand mal à soutenir son copain BOA contre l’avis de l’UA. Cela à coup sûr sera assimilé à du néo-colonialisme. Lors de la séance des questions au gouvernement au Sénat français, Jean Marc Ayrault, le ministre français des affaires étrangères, répondant à une question sur la reconnaissance par la France de Jean Ping comme le président élu du Gabon, a donné une réponse nettement différence de celle de Manuel Valls. « Nous attendons le rapport des observateurs de l’Union européennes qui donnera toute la clarté sur le déroulement de ce scrutin… » Un vrai contrepied à la position de son Premier ministre qui pense ; lui, que « le Gabon a un président… »

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