2ème anniversaire de la mort d’AMO : D’un 12 avril 2015 à un autre…!

 

   De sa trajectoire l’on retiendra qu’André Mba Obame fut opposant exilé en France. Qu’avec d’autres, comme Adrien Nguema, L’abbé Mintsa, Paul Mba Abessole, Max Anicet Koumba, Joachim Obiang Ndong, ils poseront les bases du MORENA dans ce pays, sous l’appellation Gabon Solidarité. Il a à peine 24 ans. Très précoce et déjà une grande vision politique : faire du Gabon un pays libre et démocratique.

Toujours de cette trajectoire, l’on évoquera par la suite qu’il avait quitté ses compagnons de route un beau matin de 1984 pour rentrer au bercail. Il n’a que 27 ans. Les raisons évoquées à ses proches étaient multiples. Mais l’une d’elle était qu’on ne pouvait changer ce système que de l’intérieur. André Mba Obama a-t-il réussit à le changer ?La question reste peut-être entière.

Cependant, force est de constater qu’une fois au Gabon, un débat a cour sous les lambris du Palais du bord de mer dès 1986,à savoir que le pouvoir prenait langue avecl’opposant le plus emblématique, en exil en France. En l’occurrence le prêtre spiritain, Paul Mba Abessole. André Mba Obame il faut le dire, aux côtés du président Omar Bongo où il exerce les fonctions de Conseiller du Président aux investissements va promouvoir auprès de ce dernier des idées d’ouverture de son système via son fils Ali Bongo. L’on ne s’étendra pas sur l’histoire.

D’une manière ou d’une autre il faut reconnaître qu’il a été le pionnier de l’ouverture démocratique qui s’amorcera 3 ans plus tard, dès 1989. Car cette année-là, en Mai, Paul Mba Abessole effectuera un voyage préliminaire au Gabon ; puis, il rentrera définitivement dans la même année. Ceci, à l’issue des pourparlers avec le pouvoir démarrée en 1986. Il a bien fallu des initiatives en amont pour amener Omar Bongo à de meilleurs sentiments.

Dans la foulée de ces initiatives, des événements vont s’enchainer cette année 1989. La naissance de l’UPG le 14 juillet 1989 qui vivra dans la clandestinité. Chose inédite, il se tient à Sibang au domaine Adzebe de Feu Obiang Etoughe, le premier rassemblement public en dehors des seuls autorisés à l’époque, c’est à dire ceux du PDG, puisque l’on était encore sous le joug du monopartisme. N’était-ce pas là les prémices de l’ouverture qu’AMO avait promis à ses amis en quittant la France ?Alors, pourquoi ne pas reconnaître simplement que cet homme fut, peut-être pas le pionnier de l’ouverture au multipartisme au Gabon, mais l’artisan ?

Il fallait de la méthode pour y arriver tellement l’ambition était élevée, et la tâche ardue. Comment amener Omar Bongo à accepter l’idée, convaincu qu’il était que le multipartisme était source de division dans le pays ? Par ailleurs, comment faire pour que les membres de son régime dont certains allaient perdre prébendes et privilèges acceptent de faire le pas ? Comment aborder Paul Mba Abessole pour qui André Mba Obame était un « traitre » pour avoir rejoint le pouvoir de Libreville ? Seule réponse : la méthode. Et c’est là que se révélait le génie d’André Mba Obame.

Officiellement, les pourparlers sont conduits par Samuel Mbaye et Ali Bongo en plus de Léon Paul Ngoulakia, et Marcel Sandoungou. Ilsapprochent Mba Abessole par l’entremise d’un journaliste camerounais, Anani Rabié Bindji. Ce dernier est introduit auprès du prêtre spiritain par l’éminent juriste camerounais Abel Eyingafondateur du cercle culturel africain (CCA) que fréquentent des sommités de la culture africaine comme Paul Mba Abessole, et qui plus est son ami. Dans l’ombre, AMO actionne les ficelles. Il oriente les équipes qui vont à la rencontre du père Paul. La suite on la connaît. Paul Mba Abessole propose l’idée d’un cadre d’où allait éclore le multipartisme : le Rassemblement social-démocrate gabonais(RSDG). Il le définit comme un cadre laboratoire. Mais l’idée est combattue et le vent des conférences nationales étant, l’option du RSDG est écartée et la conférence nationale du Gabon se tient de Mars à Avril 1990.

C’est ici où l’histoire doit se questionner sur la prétendue traitrise d’AMO et sa constance en politique. AMO fut-il un traitre ? Succinctement l’on dira qu’il n’est pas bien de quitter ses compagnons sans explications et surtout sans une explication convaincante. AMO avait simplement annoncé qu’il rentrait au Gabon et n’avait pas donné plus de détails. Or l’on apprend dans le fond que son grand frère Julien Nguema qui l’éleva comme son fils, a fortement influencé pour obtenir son retour.

Des discussions avec des anciens de cette période dont l’un des pionniers du Mouvement à Paris, Joachim Obiang Ndong,il ressort que les discussions en question se sont déroulées à l’Ambassade du Gabon sous l’égide de Samuel Mbaye. Omar Bongo aura voulu un engagement écrit d’André Mba Obame où il renonçait à poursuivre son combat politique pour l’instauration du multipartisme et de la démocratie au Gabon. AMO avait refusé de trahir ses convictions et ses amis de lutte, et ne parapha pas le document. Il acceptait simplement de retourner au Gabon et de rentrer dans la majorité présidentielle.

Joachim Obiang Ndong qui l’a bien connu, à cette question sur la « traitrise d’AMO » répondra qu’ « André était un homme honnête et de conviction.» Il argumente cela en rappelant la franchise qu’il avait eu de les réunir pour leur annoncer qu’il allait rentrer au Gabon pour conjuguer avec la majorité. Et que de là-bas, il allait « tout faire pour qu’on ouvre le pays à la démocratie ».

AMO a-t-il été constant ? Il sera difficile de ne pas se poser cette question si l’on veut cerner totalement le personnage. Pour atteindre l’objectif, AMO a dû, comme il l’avait dit lors de nombreuses rencontres, « faire partie du problème » pour qu’en définitive, il puisse aussi « faire partie de la solution ».

Au PDG il est perçu comme l’intrigant AMO. La bête noire des « Caciques ». C’est ainsi qu’on désignait la vieille garde d’Omar Bongo de l’ère du monopartisme. Pour les écarter il impulse avec d’autres la mouvance des « Rénovateurs ». Mouvance sous la houlette d’Ali Bongo à l’époque.

Face à l’adversité, il sera au sommet de la lutte pour la survie de ce parti et partant du pouvoir d’Omar Bongo Ondimba. Il est une mine d’initiatives. De l’affaiblissement du Rassemblement national des Bûcherons en 1998, à la tentative de neutralisation de l’Union du peuple Gabonais en 2005, AMO était à la manœuvre. En Janvier 1999, l’USAP empêche-t-elle le pouvoir de dormir à travers l’une des crises les plus fulgurantes que le système éducatif ait connu, dirigée par Christiane Bitougat,AMO sera le pompier qui circonscrira et éteindra l’incendie. Incompréhensible son offensive à l’endroit des membres de la société civile qu’il fait incarcérer à Gros Bouquet le 30 décembre 2008. L’affaire Mbanié éclate. Tout le monde le dit grillé à jamais. AMO pliera tel un roseau, laissant passer l’orage. Dans la tourmente de cette affaire, il dira au directeur de publication d’Echos du Nord un soir du 29 septembre 2006 : « je laisse faire. Toutes ces personnes ne connaissent pas le président de la République. On verra ». De retour de son périple en France, Omar mettra un terme à cette affaire. Quel levier AMO avait-il actionné ?

Lorsque l’on regarde le chemin qu’il a parcouru que d’aucuns peuvent juger ambiguë, on est tenté de dire NON il n’a pas été constant. Mais au final, force est de reconnaître qu’il est resté scotché à son idée première : « le multipartisme intégral ». Et si ces ambiguïtés n’étaient que des voies pour atteindre l’objectif ?